Les mots qui propagent des maux

Les mots qui propagent des maux

Par Maryam MOUSSAOUI – (Extrait d’un rapport de projet scolaire)

Mettre un mot ou une expression sur une réalité peut être parfois plus difficile qu’on le pense. Cependant, au-delà des débats portant sur la pertinence du terme utilisé, il est essentiel de nommer une réalité afin de faire reconnaitre son existence ; ne pas nommer une réalité pourrait conduire à l’occulter.

Le concept « islamophobie », par exemple, est sujet de débats récurrents entre ceux qui s’opposent farouchement à son utilisation au point qu’ils le qualifient de « supercherie inventée par les musulmans pour empêcher toute critique de l’Islam ».

Selon Mohammed Moussaoui, président du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM),  une définition approximative possible du terme « islamophobie », qui pourrait se déduire de ses usages les plus fréquents, serait : « L’hostilité envers l’islam et les musulmans qui peut se manifester ou se nourrir par une idéologie, des préjugés ainsi que des actes de violence ou de discrimination visant des institutions ou des personnes en raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à la religion musulmane ».

Tandis que l’utilisation du terme « islamophobie » est fortement contestée par ses opposants, l’utilisation de termes « islamisme » et « islamiste » est beaucoup plus courante, plus adoptée et moins contestée par ces mêmes individus. Il n’est d’ailleurs pas rare de trouver dans un même paragraphe, une contestation du mot « islamophobie », tout en faisant appel aux termes « islamisme » et « islamiste », dont l’usage pose un réel problème.

Selon Le Grand Larousse, édition 2014, le mot « islamisme » est défini comme « synonyme de religion musulmane ou islam et désigne depuis les années 1970, les courants les plus radicaux de l’islam, qui veulent faire de celui-ci non plus essentiellement une religion, mais une véritable idéologie politique par l’application figée de la charia et la création d’Etats islamiques intransigeants ». Le mot « islamiste » étant « relatif à l’islamisme, qui en est partisan » (Le Grand Larousse, édition 2014) est parfois utilisé dans le langage courant pour désigner le terroriste se réclamant de l’islam.

Le terrorisme se réclamant de l’islam est une réalité. Il est essentiel de la nommer afin de la reconnaître, cependant les expressions et abréviations déployées aujourd’hui afin de décrire cette réalité peuvent créer la confusion et nourrir les amalgames entre islam et violence.

Le dictionnaire Larousse, édition 2014, présente le judaïsme comme « l’ensemble de la pensée religieuse et des institutions religieuses du peuple d’Israël » et le christianisme comme « l’ensemble des religions fondées sur la personne et les écrits rapportant les paroles et la pensée de Jésus-Christ ».

En alignant ainsi les mots « judaïsme », « christianisme » et « islamisme » ou bien encore les termes « islamiste », «bouddhiste » et « hindouiste » et leurs définitions, nous faisons face à une asymétrie du langage en défaveur des musulmans.

La présence d’autres termes, dont l’usage dans le langage politique et médiatique, est aussi problématique. C’est le cas de : « Islamo-fascisme » ou « islamo-nazisme ».

Il y a évidemment une nécessité de nommer le mal pour mieux le combattre, mais « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du Monde ». Des français prétendant défendre une certaine idée de la France ont collaboré avec le nazisme et le fascisme et ont commis, au nom de cette idée, des crimes contre l’humanité. L’idée qu’ils avaient de la France était la négation même des valeurs françaises et des principes qui la fondent. Cependant désigner cette collaboration de « franco-fascisme » ou de « franco-nazisme » avec la présence du mot « France » dans ces raccourcis serait, pour les français d’hier comme d’aujourd’hui, une offense insupportable.

L’enjeu, dans ces situations consiste donc à proposer des définitions qui limiteraient les risques d’un éventuel usage problématique.

CFCM

Le Conseil français du culte musulman est une association française régie par la loi de 1901 qui a vocation à représenter le culte musulman en France auprès des instances étatiques pour les questions relatives à la pratique religieuse.

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